mardi 28 septembre 2010

Un haricot plein d'histoire : Haricot dolique



Voici un petit haricot plein d'originalité de part sa floraison tout d'abord.

Je ne le consommerai qu'en salade cette année ayant laissé séché les gousses sur place. Maintenant ne reste plus qu'à les ramasser.

Il en existe plusieurs espèces naines et grimpantes - la grimpante ayant d'ailleurs une jolie couleur violette dans mon jardin, elle sera soigneusement récoltée et menée en rames l'an prochain.

Un peu d'histoire, mais celle-ci n'est pas évidente à remonter. Il y a plusieurs versions.

  1. J'ai trouvé un joli conte sorti tout droit de chez messieurs les curés - ici :

    Le haricot dolique à tache noire est né, dit-on, pendant la révolution Française. Nous retraçons son histoire dans un journal de la Sarthe :
    "La révolution battait son plein, le curé d'un petit village d'Alsace était inquiet. "Les brigands de la République" fonçaient sur sa paroisse.
    Où vais-je cacher le Saint Sacrement ? confia-t-il à une de ses paroissiennes.
    Amenez-le chez moi, j'ai un jardin un peu en retrait du village, on le cachera dans mes haricots à rames, ils n'iront pas le chercher là.
    À l'automne, la surprise de la brave paysanne fut grande en ramassant ses haricots. Normalement, comme les récoltes précédentes, ils auraient dû être blancs, mais ils étaient tous marqués d'une petite tache brune surmontée d'une auréole blanche.
    Aussitôt, la brave femme se précipita chez son curé qui voulut reconnaître dans cette minuscule tache une hostie enchassée dans un ostensoir brun. Et le curé de s'écrier : "C'est une récompense à votre bonne Foi, à votre courage face au danger, car si cela avait été découvert, vous étiez fusillée et moi aussi, votre maison brûlée et peut être tout le village".
    La tourmente de la Révolution passée, cette histoire d'haricots miraculeux se répandit vite avec preuves en mains, car chacun des haricots semés se reproduisait avec la même marque. Et plus de 200 ans après, la signature est toujours au rendez-vous.
    C'est ainsi que les fameux haricots furent baptisés les haricots du Saint Sacrement".

  2. Un peu plus "sérieusement", nous trouvons d'autres explications : ici - bien que sur d'autres sites certains le disent originaire d'Inde (?).

    Le haricot dolique aurait été domestiqué il y a 5 000 ou 6 000 ans en Abyssinie (Éthiopie actuelle), en même temps que le sorgho, importante céréale de ce continent.
    Le dolique a tout d'abord été consommé à l'état sauvage bien longtemps avant sa domestication.
    Le dolique mongette, une sous-espèce, a été introduit au début de notre ère par les Grecs de Marseille dans ce qui était encore la Gaule, d'où il s'est répandu progressivement dans le reste du pays. Son emploi reste très fréquent jusqu'à la Renaissance, bien que les textes médicaux du Moyen Âge l'accusent de provoquer "des songes terribles et mensongers".
    Après la conquête, il sera remplacé par le haricot du Nouveau Monde et sa culture ne survivra que dans de rares régions de France : Vendée, Poitou, Charentes.
    Il est toujours cultivé en Italie, en Espagne et tout particulièrement au Portugal.
    On le trouve aussi dans les pays arabes, et au Brésil, c'est l'une des principales légumineuses locales.
    On pense qu'il a été introduit en Amérique par la Jamaïque, vers 1675, par les marchands d'esclaves noirs qui en apportaient de grandes quantités pour nourrir leur tragique cargaison. Comme il est bien adapté aux climats tropicaux et qu'il est riche en nutriments, il s'est rapidement diffusé aux Antilles.
    Au XVIIIe siècle, il y est cultivé partout. Après avoir fait son entrée aux États-Unis vers 1700, sa culture se répandra dans tous les États du Sud, remplaçant le pois, mal adapté aux températures élevées et aux sols secs.
    Aujourd'hui encore, il joue un rôle important dans l'alimentation des populations de ces régions.

  3. Usages culinaires

    Traditionnellement, en Afrique, on fait tremper les grains de dolique pendant quelques heures, puis on les frotte entre les mains pour en retirer la peau, moins digeste que le coeur.
    Toutes les légumineuses gagnent en digestibilité si on leur applique ce traitement. C'est d'ailleurs pourquoi beaucoup d'entre elles sont vendues décortiquées et fendues.
    On peut trouver dans les épiceries asiatiques, de même que dans certains supermarchés des métropoles, des gousses vertes de dolique à longue cosse. Elles sont également proposées en boîte de conserve.
    Le dolique à oeil noir est souvent vendu sous son nom anglais de Cowpea.

  4. Quelques recettes

    En Afrique, le Thiébou Niébé se prépare en faisant cuire les doliques une vingtaine de minutes.
    On fait ensuite revenir un oignon et des cubes de viande dans de l'huile, et on ajoute divers légumes (manioc, carottes, okra) ainsi qu'une bonne quantité d'eau.
    On cuit jusqu'à ce que les légumes soient tendres. Ces derniers sont ensuite retirés de la casserole, en même temps qu'un peu de sauce que l'on met de côté, et sont remplacés par du riz et les doliques mi-cuits.
    La cuisson reprend jusqu'à ce que le riz soit prêt. On sert avec la sauce.

    On peut aussi faire germer les doliques. Choisir des grains entiers plutôt que des grains décortiqués et fendus.
    On mangera les jeunes pousses crues ou on les fera sauter quelques minutes.

    Le Moyin-moyin, une variante du pouding, vient du Congo.
    Faire cuire des doliques après les avoir laissés tremper toute la nuit et débarrassés de leur peau.
    Les écraser ensuite pour obtenir une épaisse purée. Ajouter graduellement de l'eau de façon à ce que la purée soit maniable. Battre au fouet en ajoutant quelques gouttes d'huile.
    Mélanger ensemble tomates, oignon et piment fort en les hachant finement, saler et poivrer, et incorporer cette préparation aux doliques.
    La cuisson se fait au four (30 à 35 minutes) au bain-marie, dans des ramequins.
    Les Africains modifient cette recette à volonté en ajoutant aux légumes de base un peu de viande (fraîche, cuite ou en conserve), de poisson ou de fruits de mer (frais, séchés ou fumés), des carottes, des pois, des poivrons, un oeuf dur, etc.

    Les Accras constituent une variante de cette recette de base.
    Au lieu de cuire la purée au four dans des ramequins, on en fait des galettes que l'on fait frire dans l'huile et que l'on sert avec une sauce piquante.
    On fait aussi souvent cuire les doliques avec du maïs (frais, congelé ou séché) jusqu'à ce qu'ils se désintègrent et forment une épaisse purée.

    En Inde, les doliques peuvent servir à la préparation d'une soupe ou d'une purée.
    Les faire cuire dans de l'eau avec du curcuma; les écraser et ajouter des tomates, de la coriandre fraîche, des piments forts et du sel, puis poursuivre la cuisson une quinzaine de minutes.
    Faire sauter à part des oignons avec du cumin, et ajouter à la soupe. Servir sur du riz basmati.
    D'innombrables variantes sont possibles, en changeant l'équilibre des épices (curcuma, cannelle, gingembre, cumin, cardamome, coriandre, garam masala, graines de moutarde, assa-foetida, tamarin, piments forts, citron, etc.) et en servant avec différents légumes.
    À noter que beaucoup de ces épices ont des propriétés carminatives, ce qui facilite la digestion des légumineuses.

    On peut les apprêter cuits en salade avec du poulet, des oignons verts émincés et du persil.
    Décorer avec des canneberges séchées et des arachides rôties, et arroser d'une vinaigrette au miel et à la moutarde.
    On peut aussi les faire cuire dans de l'eau avec des pommes de terre, des oignons verts et des épices indiennes. Servir chaud avec des légumes verts.

    Quelle que soit la recette employée, on peut faire rôtir les doliques à sec une dizaine de minutes avant de les faire cuire dans l'eau. Ils prendront alors une agréable saveur de noisette.

  5. Culture

    On peut cultiver doliques en bac.
    Les variétés grimpantes sont du plus bel effet sur un balcon ou contre une clôture.
    On peut les cultiver pour les consommer comme mange-tout ou pour leurs grains.
    Pour éviter les problèmes de pourriture de la racine, attendre que le sol soit bien réchauffé avant de semer (autour du 6 juin dans le Sud du Québec). Semer les variétés naines en les espaçant de 5 cm à 7 cm, et les variétés grimpantes de 20 cm à 22 cm.
    Cultiver comme le haricot ordinaire, en veillant à ce que le sol soit travaillé en profondeur pour permettre le plein épanouissement de la racine pivotante.
    Les gousses du dolique à longue cosse peuvent facilement atteindre 1 m de long, mais pour la consommation, il est préférable de les récolter lorsqu'elles ont environ 30 cm.
    Les doliques peuvent croître et se répandre dans des milieux semi-arides où il ne tombe que quelques centimètres de pluie par an et où toute autre légumineuse dépérirait et ne donnerait aucun rendement.

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